Paix liturgique

Ces 27 et 28 septembre avaient lieu, à Domrémy et autour, le jubilé du 600e anniversaire des apparitions de St Michel à Ste Jeanne d'Arc. L'événement - à la fois diocésain et traditionnel - a eu la particularité d'y voir célébrer deux messes, une en nouvel ordo le samedi à 20h, une le dimanche à 9h en rite tridentin célébrée par le père abbé de Lagrasse - les deux l'ont été sur le parvis de la basilique, trop petite.

Le pèlerinage organisé par l'association universelle des amis de Jeanne d'Arc, avec le concours du diocèse de St Dié, a eu près de 1500 inscrits - les deux messes ont attiré chacune un millier de fidèles.

Les lieux johanniques étant concentrés sur un mouchoir de poche dans les contreforts de la vallée de la Meuse entre la basilique de Domrémy et Notre Dame de Bermont, avec le bourg de Greux et celui de Domrémy entre, les Lorrains ont inventé un nouveau concept, celui de pèlerinage statique - pas de longue colonne avec des dizaines de bannières donc, néanmoins il y avait beaucoup de marcheurs, avec ou sans étendards, pour monter vers Bermont où l'on pouvait voir, outre la chapelle que Jeanne d'Arc a connue, l'anneau de Jeanne d'Arc et une de ses lettres, des reliques des saintes Thérèse prêtées par le sanctuaire de Lisieux, Catherine et Marguerite.

L'aller retour entre Bermont et la basilique, "c'est bien 15 kilomètres de marche, et c'est vallonné", constatait un groupe de pèlerins de la région parisienne, un peu essoufflé en haut du sentier de Bermont.

Bonne affaire aussi pour le café de Greux, qui multipliait les pintes et les lentilles, à défaut de pains et de poissons, et la municipalité de Greux, petit village de 130 habitants dont les vitraux de l'église - pleine à craquer pendant les concerts et les vêpres grégoriennes - sont consacrés aux apparitions à Jeanne d'Arc. "Jeanne fait partie du village, elle est d'ici, elle a pu faire partie de nos familles". A l'époque Domrémy et Greux ne faisaient qu'une paroisse.

Quatre frères de Cheméré, trois séminaristes de la FSSP et plusieurs autres prêtres de communautés traditionnelles accompagnaient les méditations des pèlerins sur les chemins - il y avait aussi des représentations de pièces de théâtre liées à Jeanne d'Arc au stade de Greux, des méditations à l'église de Domrémy par les sœurs des Béatitudes d'Autrey, des chants de louange, un forum des associations etc.

"Ici, tout le monde se mélange, les gens se parlent, chacun est accueilli dans sa diversité pour l'unité de l'Eglise", et de fait, il y avait des fidèles le matin du dimanche qui découvraient le rite tridentin, tandis que d'autres étaient émerveillés par la procession, les chants et les moments d'adoration de la messe en nouvel ordo de la veille, concélébrée par les évêques de St Dié (Mgr Gourdon), Reims (Mgr de Moulins Beaufort), Nancy (Mgr Michel) et l'émérite d'Angers Mgr Brugués.

Mgr Gourdon a d'ailleurs donné rendez-vous aux pèlerins pour l'année prochaine - "nous fêterons les 100 ans de la consécration de la basilique de Domrémy", monumentale et qui est visible de loin, se détachant sur le coteau, mais qui ne tient que 500 fidèles.

Lyon, Grenoble, Quimper et Concarneau, Aubusson, Compiègne ou encore Clermont - le jubilé des apparitions a attiré des pèlerins venus de loin. Patrick vient de de Lyon : "ça fait longtemps que j'attendais un pèlerinage pour Jeanne d'Arc, c'est quand même le cœur de l'histoire de France".

Des pèlerins sont venus d'autres villes johanniques, comme cette dizaine d'habitants de Compiègne assis autour d'un frère de Cheméré à mi-côte entre Bermont et le bourg. Un strasbourgeois témoigne "Jeanne d'Arc c'est la France, donc évidemment je suis venu à Domrémy pour le jubilé". Un habitant de Valence qui "sera à Nosto Fe la semaine prochaine ", pour qui "Jeanne d'Arc est un symbole d'unité et de courage, on en aurait bien besoin de nos jours".

D'autres, plus locaux, sont de Nancy et de Metz. "On vient pour Jeanne d'Arc bien sûr, mais aussi les messes et la possibilité de voir des reliques qu'il n'y a habituellement pas ici", l'anneau de Jeanne d'Arc notamment. La basilique était ouverte toute la nuit pour l'adoration et des pèlerins marchaient sur la route entre le bivouac en bas, derrière Domrémy, et la basilique sur le coteau.

De Quimper et de Concarneau, deux retraitées, drapeaux bretons sur leurs sacs, assistent à la messe traditionnelle ; un pèlerin de Corrèze fait le bilan : "ça a été un pèlerinage magnifique, et surtout il y avait de tout, de la louange comme l'adoration des reliques là même où Jeanne d'Arc venait prier, une messe le soir avec une très belle procession et des chants magnifiques, des assemblées très priantes. Je reviendrai". Dans trois semaines, il ira marcher dans le Béarn ou un pèlerinage traditionnel ira à Lourdes.

Alors que le soleil perce timidement le brouillard épais, le père abbé de Lagrasse affirme : "il faut aimer Dieu comme Jeanne dans les victoires et quand il est flagellé (...) que Dieu soit la lampe, comme Jeanne, qui rayonne en nous". Alors que le brouillard enveloppe à nouveau la basilique, la messe s'achève alors qu'un millier de fidèles chante d'un seul élan "St Michel archange, défendez nous dans les combats, Saint Michel Archange, gardez nos âmes du trépas".